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Hyacinthe Besson

Besançon, 1816 - Mossoul (Irak), 1861


Hyacinthe Besson, né à Besançon le 10 avril 1816 et mort au couvent de Mar-Yacoub près de Mossoul (Irak) le 4 mai 1861.





Un revers de fortune obligea sa mère à se placer à Paris où elle fit venir son fils. Celui-ci manifesta, dès le collège, un goût très vif pour le dessin en surchargeant ses cahiers de caricatures et de portraits parmi lesquels son propre portrait qu'il dessina en 1834. On confia le jeune-homme au peintre Souchon, élève de Davis, et les progrès furent si rapides que dès 1843, Besson put réaliser le portrait de l'abbé Leclerc son bienfaiteur. En même temps il suivit les conférences du socialiste chrétien Buchez, où il rencontra Eugène Bion, Jean du Seigneur, de Steinle, Boileau, Louis-Alexandre Piel et Pierre Requédat. Collaborateur de Piel dans les articles de critique d'art qu'il publiait à l'Européen, Besson encouragea encore Souchon, son maître, à peindre un Poème de Jeanne d'Arc en trois tableaux : Vocation, Victoire et Martyre de l'Héroïne. Dans une idée d'apostolat social, il composa des dessins destinés à remplacer, par des sujets religieux et légendaires, accompagnés d'un texte explicatif, les images d'Epinal qui avaient peuplé les mansardes populaires de complaintes illustrées de crimes célèbres et de représentations des batailles de l'Empire. Ces dessins furent gravés sur bois à Metz et édités à Paris par Eveillard, disciple de Buchez. On cite un Christ prêchant la fraternité au monde. Lié avec le fils du duc de San-Carlos, depuis le collège, Besson devint professeur des filles de ce personnage, ancien ambassadeur d'Espagne. Il partit ensuite pour l'Italie avec Souchon, son maître et. Sigalon qui venait de recevoir la commande d'une copie du Jugement dernier, de Michel-Ange, aujourd'hui à l'Ecole des Beaux-Arts. Ce voyage fut une révélation pour l'artiste qui l'exécuta en voiturin par Lyon, Avignon, Marseille, Nice, Gênes. Florence, Sienne, Pérouse et Assise. Il y dessina des vues de cloîtres, des intérieurs d'églises et des paysages. De retour à Paris. il eut le désir de devenir élève d'Ingres, mais le départ de ce maître pour Rome l'obligea à entrer dans l'atelier de Paul Delaroche. ll y reprit l'étude du dessin, fit des études d'anatomie sous la direction du chirurgien Tessier, son ami, exécuta au Louvre en particulier celle de l'Ensevelissement, du Titien qu'il donna à l'abbé Desgenettes et qui orna longtemps la sacristie de l'église Notre-Dame-des-Victoires, à Paris. Avec Piel et Roux-Lavergne, il étudia passionnément l'esthétique de Notre-Dame de Paris, où il flt un moulage de la tète du Christ dans le bas-relief du choeur représentant Notre-Seigneur instituant l'Eucharistie. En mai 1837, la vocation religieuse de Besson et de Roux-Lavergne, son ami, se dessina et les conduisit chez l'abbé Desgenettes, curé de Notre-Dame-des-Victoires qui accueillit bientôt plusieurs autres disciples de Buchez. En 1838, Besson s'installa à Rome avec sa mère : il y fit de nombreux croquis et des études peintes d'après la campagne romaine. En 1839, il se lia avec l'historien Cartier et se rendit à Assise où il exécuta douze dessins d'après les fresques attribuées à Cimabüe, puis dix-sept autres dessins d'après celles de Giotto. Ses dessins très librement traités lui révélèrent le secret du génie et des procédés des Primitifs italiens. Il y ajouta une suite d'études de la Vie du Christ, d'après Taddeo Gaddi et Puccio Capanna; de la Vie de la Vierge Marie, d'après Giunta Pisano; de la Vie de saint Martin, d'après Simone Memmi; de la Vie de sainte Catherine d'Alexandrie, d'après Pace di Faenza, des compositions de groupes et de madones; des paysages, parmi lesquels un fusain d'après l'immense plaine où se déroule en serpentant Le Rivo-Torto. Le 8 avril I829, Lacordaire et Requédat, anciens disciples de Buchez, revétaient la robe des Frères-Précheurs, à Rome.
La veille de cette prise d'habit, Requédat demanda à Piel, son ami, de proposer aux peintres Besson, Cabat et Cartier, fixés à Rome, d'y fonder la Confrérie de Saint-Jean. Le 4 juillet suivant, Besson reçut de Lacordaire le règlement de cette Confrérie dont, il fut un des premiers membres. Dès le début de 1839, il travailla à un tableau représentant la Résurrection de Lazare, sur les indications de Lacordaire. Remanié après son séjour à Assise et malgré les encouragements du peintre allemand Overbeck, ce tableau resta à l'état d'esquisse, aujourd'hui chez les Dominicains de Saint-Clément à Rome. Besson se rendit ensuite à la Quercia où il fit une copie de la Mère de Dieu, de Martello, dit Le Monetto, destinée au premier couvent des Dominicains que Lacordaire construirait en France. En 1840, l'artiste abandonna le monde pour l'ordre des Dominicains. Le 16 mai de la même année, il entra au couvent de Sainte-Sabine où Lacordaire installa les disciples qu'il destinait au rétablissement des Frères-Précheurs en France, puis commença son noviciat à Saint-Clément. Il y eut pour condisciples Piel, Hernsheim, Jandel, Aussant, Bourard, Rey, d'Arres, Bonhomme et Danzas, groupe qui comptait quatre peintres  : Besson, Aussant, Bonhomme et Danzas, et un architecte  : Piel. De Rome, Besson fut envoyé au couvent de Bosco, en Piémont, avec ce groupe d'artistes qui visita Florence et Sienne. Le 29 mai 1842, il fit sa profession religieuse. Quand il entra dans l'ordre des Dominicains, Besson avait renoncé à la peinture. Il voulut même détruire ses dessins qui étaient restés à la Minerve, mais Lacordaire les donna au peintre Claudius Lavergne. En 1845, il fut nommé directeur du noviciat de Chalais,près de la Grande-Chartreuse (Isère). Vers cette date, le P. Aussaut ayant été autorisé à peindre le portrait du P. Besson, celui-ci oublia ses serments et peignit un Baiser de saint Dominique et de saint François qui appartint successivement à Mme de Mesnard et à Mgr Mermillod.


Hyacinthe Besson, porteuses de linge
Hyacinthe Besson (1816-1861), Porteuses de linge, musée du Louvre département des Arts graphiques.



Le 3 octobre 1845, il songea à décorer l'église de Chalais dans le but d'en faire « un lieu de pèlerinage dont on emporte un doux souvenir ». Au tympan de cette église, il peignit une Vierge de Miséricorde couvrant de son manteau l'ordre des Frères-Précheurs, sujet qu'il grava plus tard à l'eau-forte. Il exécuta encore des paysages, des portraits de ses novices, des aquarelles : le Bon Pasteur avec ses brebis entourées de lys ou d'épines, la Vierge agenouillée tenant son fils, etc. En décembre 1846, il quitta la couvent de Chalais pour celui de Nancy où il s'adonna à la prédication, en particulier dans les communautés religieuses. Le couvent de Saint-Dominique de Langres reçut, vers cette époque, des aquarelles que le P. Besson exécutait pour compléter ses prédications ou en fixer le souvenir. Le 8 octobre 1850, il fut nommé prieur du couvent de Sainte-Sabine à Rome dont il entreprit « la restauration morale et la restauration artistique ». II fit d'abord les cartons de vitraux qu'il voulait peindre et cuire lui-même, afin de diminuer la dépense, comme le P. Danzas l'avait fait dans la nouvelle église dominicaine de Lyon. Ayant été obligé d'abandonner ce projet, faute de ressources, il obtint l'autorisation de décorer la salle capitulaire de Saint-Sixte-le-Vieux, berceau de l'ordre de Saint-Dominique. Commencée dans l'été de 1852, cette œuvre considérable, qui couvre plus de deux cents mètres de superficie, ne fut achevée qu'en 1859. L'artiste commença la décoration par la paroi de gauche où il représenta la Vierge du Rosaire, le Baiser de saint Dominique et de saint François, l'Apparition des SS. Pierre et Paul à saint Dominique. Sur les piliers qui séparent les trois tableaux, quatre saintes domi-nicaines sont représentées deux par deux : Agnès de Montepulciano, Catherine de Sienne, Rose de Lima et Catherine de Ricci. Sur les piliers correspondants, près de l'autel, le P. Besson désirait placer quatre saints dominicains : Pierre Martyr, Vincent Ferrier, Thomas d'Aquin et Hyacinthe, qu'il n'exécuta pas. La Croix triomphante du Christ occupe le centre de cette décoration qui comporte encore des motifs symboliques empruntés à la flore, des rinceaux et des voûtes peintes d'azur,le tout exécuté avec un mélange de cire et d'huile qui a beaucoup noirci. Une multitude de dessins et de maquettes furent établis par l'artiste au cours de ce travail qu'il interrompit quelques mois et reprit d'octobre 1853 à juin 1854, date de 1'envoi du P. Besson à la Quercia où il peignit, pour l'église de Pibrac, un tableau représentant la Bienheureuse Germaine Cousin. À son retour à Sainte-Sabine, les charges d'un second priorat, puis un premier voyage en Orient, enfin un séjour en France, retardèrent jusqu'en 1859, la fin de cette décoration avec la Résurrection de l'Enfant, en face de la porte d'entrée. II trouva le temps de diriger encore des fouilles sur l'Aventin et d'aller fonder le couvent de Corbara (Corse). Le 23 septembre 1856, il quitta l'Italie comme visiteur apostolique de la Mission de Mossoul. Tout en réorganisant cette mission, il lithographia des alphabets et des dessins pour le service des écoles ; peignit une Vierge de miséricorde sur fond d'or, exécuta des aquarelles d'après les sites des environs du couvent de Mar-Yacoub pour lequel il modela, et peignit une statue de la Vierge. Le 20 avril 1858, il quitta Mossoul pour la Terre Sainte, pèlerinage qui lui inspira cent dix dessins ou esquisses. Le 18 septembre 1859, après avoir achevé la décoration de Saint-Sixte-le-Vieux, visité la France et la Belgique, il retourna à Mossoul. Deux ans après, les fatigues de l'apostolat et la fièvre typhoïde qu'il avait contractée en soignant les malades de la mission pendant une épidémie l'obligèrent à se rendre au couvent de Mar-Yacoub où il mourut. Son corps repose aujourd'hui dans une petite chapelle, sur le versant de la montagne.


In : Dictionnaire des Artistes et Ouvriers d'Art de la Franche-Comté
Abbé Paul Brune, 1912