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Jules Adler

Luxeuil-les-Bains, 1865 - Nogent-sur-Marne, 1952


« Jules Adler est mort ! Cette nouvelle est venue frapper tous les amis francs-comtois du grand artiste, le plus grand depuis Courbet. [...] Adler fut avant tout le peintre des humbles. Les ouvriers de chez nous qui ont lu distraitement l'annonce de sa mort, savent-il qu'il fut leur ami ? »

« Un grand Franc-Comtois n'est plus : le peintre Jules Adler »,
La Liberté de l'Est, 13 juin 1952, Archives privées, Fonds Althoffer.






Le peintre Jules Adler

Lucien Barbedette,
Éditions Sequania, Besançon, 1938

ENFANCE ET PREMIÈRES ÉTUDES


Jules Adler naquit à Luxeuil le 8 juillet 1865. Entourée d’une splendide ceinture de prairies et de forêts, avec les sommets des Vosges pour horizon, cette petite ville est riche, en outre, de trésors artistiques que les plus grands centres se réjouiraient de posséder. Sa Tour de Ville, son hôtel du cardinal Jouffroy, son cloître, sa basilique Saint-Pierre, sa maison du bailli, sa maison François Ier constituent un ensemble unique dans la région comtoise souvent dévastée par les guerres. De vieilles demeures en grès rouge rappellent l’époque de la domination espagnole ; elles ont grand air et donnent à certaines rues un aspect de musée. Lorsque Jules Adler enfant, puis collégien, parcourait allègrement Luxeuil en compagnie de ses jeunes et joyeux camarades, elles étaient plus nombreuses encore ; la ville possédait un parfum d’antiquité qu’elle n’a pas perdu, mais que les transformations survenues depuis ont néanmoins atténué.

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Jules Adler

Samuel Monier,
Responsable des collections et des expositions temporaires
in : Guide-musée des beaux-arts de Dole, 2009.

« Le peintre des humbles », tel est le qualificatif le plus usité qui revient à la lecture de la documentation relative au peintre franc-comtois Jules Adler. Réductrice, cette dénomination n'en traduit pas moins son attachement à la représentation de l'homme du peuple, qu'il soit mineur, haleur, ou simple chemineau, dans une période marquée par les bouleversements sociaux provoqués par la révolution industrielle. La grève au Creusot (coll. musée des beaux-arts de Pau) lui valut ainsi un succès important au Salon de 1900. Toutefois, l'analyse de sa production et du contexte de sa création ouvre d'autres perspectives d'appréciation de sa démarche artistique. Paris vu du Sacré Coeur, toile ambitieuse de sa période tardive, en témoigne pleinement. Formé dans le sérail académique parisien, entre l'École des beaux-arts et l'Académie Julian où il fut l'élève de Bouguereau, Jules Adler exposa au Salon dès 1888. De cet enseignement rigoureux, il retint une science rompue de la composition qu'il allia, notamment sous l'influence du dessinateur et peintre Théophile Steinlen, à un sens aigu du naturalisme. Au moment où s'affirmait la peinture moderne, Adler, en adepte du Réalisme initié par Courbet, l'incarna davantage par l'attention portée au monde contemporain que par son registre formel. À l'écart des courants post-impressionnistes dont la liberté d'expression s'accommodait mal de son langage réaliste, il sut toutefois, au tournant du XXe siècle, insuffler dans ses Å“uvres une sensibilité nouvelle, redevable à l'Impressionnisme d'une attention portée à la restitution de l'atmosphère environnant ses compositions. En outre, la pratique de la peinture de paysage, à laquelle l'initia l'artiste jurassien Pascal Dagnan-Bouveret, joua aussi un rôle dans cette évolution, notamment sur le chromatisme de ses Å“uvres.
Dans Paris vu du Sacré Coeur, les tons assourdis de ses débuts font ainsi place à une palette de couleurs chatoyantes où le sens de la touche acquiert une expression plus vibrante. Mais l'originalité de l'œuvre tient à la conception spatiale mise en œuvre. En germe dans Les fumées (1924, coll. musée des Ursulines de Mâcon), elle décrit un vaste panorama urbain parisien dont l'ampleur est sublimée par le contrepoint avec un premier plan dominant où des personnages figés fixent l'ho-rizon. Leur posture de dos face au lointain, à l'image du modèle créé par le peintre romantique allemand Friedrich, induit une dimension poétique révélatrice d'une facette plus subtile de cet artiste, dont la réputation de chantre de l'homme du peuple s'infléchit alors dans un sens plus humaniste.




La Grève au Creusot

L'Histoire par l'image

Au xixe siècle, les usines Schneider au Creusot sont les plus grandes de France. Pendant trente ans — de 1871 à 1899 —, la paix sociale y est solidement établie, facilitée tout à la fois par la croissance soutenue, le calme des ouvriers satisfaits d’appartenir à une grande entreprise à la pointe du progrès et par le paternalisme des dirigeants soucieux du niveau de vie de leurs « employés » et de leur formation professionnelle.

Cependant en 1898, toute une série de changements entraîne un bouleversement de la situation : les radicaux gagnent les élections de mai ; Eugène II Schneider, nouveau patron trop absorbé par ses tâches parisiennes, accède à la tête de l’entreprise ; l’afflux des commandes entraîne une accélération des cadences de travail et, aussi, des profits dont les ouvriers sont irrités de ne rien percevoir. La question de la création d’un syndicat est à l’ordre du jour.

De mai 1899 à juillet 1900, les usines du Creusot connaissent plusieurs accès de grèves, notamment entre le 31 mai et le 2 juin puis entre le 20 septembre et le 1er octobre. Le 24 septembre 1899 a lieu une grande manifestation réunissant plus de 7 000 personnes, au cours de laquelle les Creusotins remercient leurs voisins de Montchanin pour leur soutien.

C’est cette journée de grève et de manifestation que peint Jules Adler. Tous les éléments constitutifs du tableau sont empruntés à la réalité observée : comme l’attestent ces photographies qui ont été prises du cortège, le paysage marqué à droite par les chevalets des mines Saint-Pierre et Saint-Paul, les manifestants en nombre, la multiplication des drapeaux tricolores et les rameaux pacifiques arrachés aux arbres, la présence des femmes, dont le rôle fut notable pendant la grève, et les enfants portant des tambours…

Cependant Adler modifie certains aspects et les organise différemment. Il choisit notamment de mettre en valeur les mains fraternellement serrées en tête du défilé à la place des tambours et des clairons ; il mélange les âges et creuse les traits des manifestants. Surtout, il représente une foule désordonnée, alors que les usages de la manifestation imposaient un cortège structuré et au pas souvent cadencé.

L’intention principale du peintre est visiblement, grâce au cadrage et au grand format, de transformer celui qui contemple son tableau en spectateur de la manifestation. Au-delà des détails véridiques empruntés au Creusot, c’est un témoignage universel qu’il veut porter. Il peint la condition ouvrière comme un modèle de fraternité malgré la dureté du travail et surtout comme une promesse de libération : la femme portant le drapeau au premier plan n’est-elle pas une « moderne Liberté » reprise de l’allégorie de Delacroix ?

Pour l’historienne Michelle Perrot, à travers ce tableau, « le calme Creusot fournit à l’imagerie de la grève une de ses représentations les plus célèbres ».




Jules Adler

Musées de Franche-Comté

Jules Adler (1865-1952), peintre naturaliste, est surnommé « Le peintre des Humbles ».
Il est né à Luxeuil en 1865. En 1882, passionné par le dessin, il quitte sa ville natale pour s’installer à Paris.
Sa vocation le conduisit à suivre les cours des Arts décoratifs. Il continua sa formation à l’Académie Julian en 1883 où il est l’élève de Bouguereau et de Tony Robert-Fleury qui lui permettront d’être admis aux Beaux-arts.
En 1888, il expose son premier tableau : Misère.
Il est reconnu pour être un historien austère et véridique de la vie populaire. Il sait émouvoir le spectateur par la vérité d’expression des visages et des mouvements.
En 1933, il inaugure son musée dans sa ville natale de Luxeuil.
Il meurt en 1952 dans une relative pauvreté à la maison de retraite pour artistes à Nogent-sur-Marne.
L’œuvre d’Adler est un ensemble de documents d’histoire sociale pendant la période de la révolution industrielle.
Il a compris l’austère grandeur du machinisme actuel. Adler s’est intéressé à la vie de l’ouvrier dans les usines, du chemineau le long des grandes routes de France. Les malheureux viennent à lui, le poète de leurs souffrances, auxquelles son art sait donner un peu de beauté.




Jules Adler

Wikipedia

Troisième fils d'un marchand d'étoffe de Luxeuil-les-Bains, Jules Adler quitte la Franche-Comté à l'âge de 17 ans. Il s'installe alors à Paris avec sa famille. Il étudiera dans un premiers temps à l’École des Arts Décoratifs, où il est l'élève de William Bouguereau, de Tony Robert-Fleury et enfin aux Beaux-Arts avec Pascal Dagnan-Bouveret. En parallèle, dès 1883, il suit les cours de l'Académie Julian. Après un premier échec, il réussit son entrée en 1884 à l'École des Beaux Arts de Paris.
Massié à l'Académie Julian, il créera le bal masqué de l'académie qui devriendra plus tard le bal des quat'zarts.
En 1888, il débute au Salon avec sa toile, Misère. Adler est plusieurs fois médaillé au salon et participe à de nombreuses expositions, son thème de prédilection est le monde ouvrier et il est surnommé le peintre des humbles. Il obtient une médaille d'or avec son tableau, Joies populaires ; l'une de ses toiles les plus célèbres est, La Grève-Le Creusot, exposée au Salon de 1900 qui a énormément de succès. Le 7 aout 1899 s'ouvre le second procès du Capitaine Dreyfus, à Rennes, Adler prendra parti dans l'Affaire et sa maison deviendra un centre de Dreyfusard. En 1903 il est membre fondateur du Salon d’automne au Petit Palais.
De 1914 à 1918, il installe place Pigalle, une cantine d'aide aux artistes, qui servira plusieurs milliers de repas et offrira des vêtements aux artistes. En 1914, le peintre est chargé de mission artistique à Verdun et rapporte des dessins, croquis et photographies. Il est nommé professeur aux Beaux-Arts de Paris en 1928.
Durant la Seconde Guerre mondiale, en 1944 il sera envoyé au camp de Drancy.
Il meurt en 1952 dans une relative pauvreté à la maison de retraite pour artistes à Nogent-sur-Marne.



• En 1933, est inauguré un musée à son nom dans sa ville natale, Luxeuil-les-Bains et installé depuis 1965 aux 3ème et 4ème étages du musée de la Tour des Echevins.

• Une rue de Luxeuil-les-Bains porte son nom.



Å’uvres dans les collections publiques :
– La grève au Creusot, 1899, Musée des beaux-arts de Pau.
– Marché du faubourg Saint Denis, Remiremont, musée Charles de Bruyères.
– L'Armistice, 1918, Remiremont, musée Charles de Bruyères.
– La Mobilisation, 1914, musée d'Histoire et d'Archéologie de Belfort.
– Panorama de Paris vu du Sacré-Cœur, 1935, musée des beaux-arts de Dole.
– L'Accident, 1912, musée des beaux-arts de Dijon.
– Les Haleurs, 1904, Paris, musée de la Tour des Échevins de Luxeuil-les-Bains.
– Le Chemineau, 1908, Luxeuil-les-Bains, musée de la Tour des Échevins.
– La Soupe des pauvres, 1906, Paris, Petit Palais.
– La Rue, 1895, Castres, musée Goya.
– L'Homme aux cruches, musée des beaux-arts de Marseille.
– Le Jardinier Fleurot, palais des beaux-arts de Lille.
– La Grève au Creusot, 1899, Le Creusot, écomusée, château de la Verrerie.
– Fanfare, 1927, musée de la Chartreuse de Douai.
– Joies populaires, 1898, Mâcon, musée des Ursulines.
– Les Las, 1897, Avignon, musée Calvet.
– Les Hauts-Fourneaux de la Providence, vers 1904, Luxeuil-les-Bains, musée de la Tour des Échevins.
– Les Sardinières de Douarnenez, 1900, Luxeuil-les-Bains, musée de la Tour des Échevins.
– Deuil en Limousin, 1931, Luxeuil-les-Bains, musée de la Tour des Échevins.
– Neige, 1929, Luxeuil-les-Bains, musée de la Tour des Échevins.
– L'Alsacienne, 1928, musée de la Tour des Échevins, Luxeuil-les-Bains.
– Portrait d'André Maroselli, 1932, Musée de la Tour des Échevins, Luxeuil-les-Bains.



• Tous mes remerciements à Samuel Monier, coordinateur des expositions temporaires et chargé des collections au musée des beaux-arts de Dole, pour ses conseils avisés et la mise à ma disposition de plusieurs catalogues qui m'ont permis d'enrichir cette entrée.