Née en France en 1968, Lydie Jean-Dit-Pannel vit et travaille entre Dijon et Paris. Elle enseigne à l’Ecole Nationale Supérieure d’Art de Dijon.
"BORN LIKE THIS, BORN INTO THIS."
Charles Henry Bukowski (1920-1994)
Lydie Jean-Dit-Pannel questionne l’image depuis plus de 20 ans au travers de projets au long cours*. La vidéo, la photographie, la performance, l’installation, le tatouage et le texte donnent des formes à son travail.Très sensibilisée aux atteintes que l’homme porte à la planète elle produit des œuvres importantes liées à la disparition du papillon Monarque ou à la dissémination nucléaire. Lydie Jean-Dit-Pannel vit et travaille entre Dijon et Paris. Elle enseigne à l’Ecole Nationale Supérieure d’Art de Dijon.
Depuis quelques années, Psyché est devenue sont égérie. Cette héroïne antique pensive, aventurière solitaire, amoureuse blessée et guerrière survivante s'était imposée comme son alter-ego artistique. Elles étaient devenues les meilleures amies du monde. Elles se racontaient tout et mordaient la poussière ensemble.
Depuis 2004, elle pousse plus loin la question de l'image par le biais du tatouage : une autre façon de faire de l'image en mouvement, en l'inscrivant dans le temps.
Lydie Jean-Dit-Pannel se fait tatouer lors de chacun de ses voyages un papillon monarque femelle. Son corps petit à petit, s'anime du bruissement des ailes du seul papillon migrateur de notre planète.**
Lors d'une longue résidence à l'insectarium de Montréal, puis de plusieurs séjours au Mexique, elle a réalisé de nombreuses images. Celles-ci se conjuguent et se multiplient avec les papillons encrés sous la peau afin de donner naissance à des installations et des dispositifs vidéo.
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- LE PANLOGON, un film journal in progress (durée actuelle 5h)
- La Collection
- ALIVE. publié au jour le jour depuis 2009 sur le réseau social Facebook…
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Ce lépidoptère effectue chaque année un voyage de près de 4000 kilomètres, du Canada au Mexique, afin de se reproduire dans les forêts du Michoacan. Le paysage s'anime alors d'une nappe orangée bruissante de millions de papillons réunis pour leurs ébats amoureux et la survie de leur espèce, menacée par la déforestation et les pesticides.
Ce texte ainsi que tous les visuels de la page proviennent du site de l'artiste :
Lydie Jean-Dit-Pannel ALIVE
Lydie Jean-Dit-Pannel, une artiste lanceuse d’alerte
Sur le site Alternatiba
« L'automne était là . Elle avait chargé sa voiture et prit la route au tout petit matin.
Elle commençait un tour de France de l’atome. Après plusieurs mois sur les chemins nucléaires au Japon, en Ukraine, aux États-Unis, elle s’attaquait à son pays. La France et ses 58 réacteurs. La France et ses sites de stockage. La France et ses anciennes mines d’uranium contaminées. La France et ses installations nucléaires militaires. La France et ses sites de démantèlement. La France et ses projets d’enfouissement. La France et ses déchets. La France pays le plus nucléarisé au monde.
Seule avec ses démons et ses obsessions, elle partait sans aucune unité de temps. Juste une destination et puis une autre, à son rythme, à celui des images et des rencontres. Elle fit le tour à pied du site de stockage de l’Aube. Elle pissa dans une station service avec un bus entier de japonais sur l’aire du Haut-Koenigsbourg. Elle mit Psyché au bain dans le Grand canal d’Alsace face à la centrale de Fessenheim. Les fesses dans le Styx, elle contempla l’enfer. Elle se perdit dans le brouillard de Cattenom. Elle mangea un délicieux risotto vegan chez des amis de Metz. Elle filma des vaches, des ânes, des chevaux. Elle abandonna Psyché à chaque fois. Elle passa du temps au poste de gendarmerie de la centrale de Chooz. Elle chia sur les feuilles mortes dans les forêts des Ardennes en regardant passer un hanneton. Elle secoua les arbres pour faire une pluie jaune d’automne. Elle fût fascinée par la collection d’art brut du LaM. Elle se prit une cuite géante et dansa jusqu’au matin au Lyautais à Lille. Le silence électrique aux pieds des centrales la tétanisait. Elle regarda le dernier épisode de « Orange is the new black » dans un hôtel minable qui sentait les pieds des autres. Les personnages de la série lui manquèrent dès le lendemain. Elle avait l’addiction facile. Elle prit la direction nord ouest totale. Gravelines. Penly. Paluel. Cherbourg. La Hague.
Après plus de 10 000 kilomètres avec sa petite voiture sur les routes françaises, elle était de retour chez elle après cinq mois. Elle se sentait seule. Elle se rendait compte avec effroi que les sites nucléaires lui manquaient. La route lui manquait.
L’adrénaline dégagée lorsqu’elle faisait ses images lui manquait. Elle passa les nuits qui suivirent son retour les yeux écarquillés sur la petite télévision en face du lit sans voir une seule image. Les jours étaient fait de tentatives de sommeil. Elle n’avait encore pas eu le temps de reprendre son journal de bord et de l’augmenter de son recul. Elle avait la digestion lourde. Des kilomètres d’images l’attendaient, des centaines de pages de notes prises à la hâte à décrypter.
Le truc c’était ça. Appréhender le site dans son ensemble. En faire le tour plusieurs fois par la route. Repérer les angles. S’emmancher sur chaque chemin. Marcher dans les ronces par les champs ou la forêt pour arriver au plus près de la cathédrale nucléaire. Tester plusieurs points de vue en essayant de ne jamais se trouver dans le champ des caméras de surveillance. Gérer l’endroit où garer sa voiture. Décider de l’espace où mettre en scène Psyché. Installer le trépied. Y fixer le petit Lumix. Enlever ses chaussures. Faire le cadrage. Vérifier qu’aucune ronde de gendarmes n’était en vue. Se dessaper rapidement — sa tenue de tournage (un jean noir usé, un blouson à capuche, des Doc Martens à fermeture éclair, pas de sous vêtements pour être Psyché au plus vite) commençait à être un peu sale. — Détacher ses cheveux. Enclencher le retardateur de l’appareil photo. Courir. Se jeter au sol. Attendre le ventre froid. Retenir sa respiration. Clic à 10 secondes. Clic à 12 secondes. Clic à 14 secondes. Se relever à la hâte. Mettre l’appareil en mode lecture. Vérifier que le corps était bien placé dans le paysage — Les graviers marquaient longtemps sur sa joue. Souvent il pleuvait. Toujours le silence électrique endémique aux sites nucléaires. — Répéter l’opération plusieurs fois. Jusqu’à avoir le sentiment d’une bonne photographie. De temps à autre présenter ses papiers d’identité. Trouver une explication à sa présence autour d’un site à risques. Feindre l’ignorance. Préserver ses images. Les discussions et les 37 sites atomiques autours desquels elle avait erré ces derniers mois hantaient ses jours ses nuits et chacun de ses actes d’amour. Elle pouvait toucher la folie du bout de ses ongles en étendant à peine le bras. »
Lydie Jean-Dit-Pannel
Lydie Jean-Dit-Pannel est une artiste plasticienne française née le 9 juillet 1968 à Montbéliard. Elle vit et travaille entre Dijon et Malakoff. Elle enseigne à l'École nationale supérieure d'art de Dijon depuis 2012. Elle questionne l’image depuis les années 1980 au travers de projets au long cours. La vidéo, la photographie, la performance, l’installation, le tatouage et le texte donnent des formes à son travail.
Å’uvres
Très sensibilisée aux atteintes que l’homme porte à la planète elle produit des œuvres importantes liées à la disparition du papillon Monarque ou à la dissémination nucléaire. Depuis 2004, elle se fait tatouer lors de chacun de ses voyages un papillon monarque femelle. Son corps petit à petit, s'anime du bruissement des ailes du seul papillon migrateur de notre planète. Depuis 2012, Psyché est devenue son égérie. Alter-ego qu’elle façonne dans le sillage de la femme aux papillons, l’héroïne antique est une femme blessée, nomade et amoureuse. A travers elle, Lydie Jean-Dit-Pannel dit sa déception face aux désastres liés à l’anthropocène et sa détermination de guerrière à vouloir y répondre. Elle met en scène pour cela l’abandon d’une Psyché contemporaine, échouée sur les sites nucléaires et/ou toxiques à travers le monde, figée nue, face contre terre, terrassée.
Å’uvres majeures
LE PANLOGON
Lydie Jean-Dit-Pannel a tenu un journal filmé pendant 10 ans.
Composé de 11 chapitres, il est d'une durée actuelle de 5h et se compose de centaines de plans séquences numérotés, tels des haïkus visuels et sonores.
Débuté en 2001, lors de l'acquisition de sa première unité de montage vidéo personnelle, ce journal, au fil des saisons, a accompagné Lydie Jean-Dit-Pannel dans tous ses voyages et ses expérimentations. Il est à la fois un autoportrait, un journal de bord et un carnet de croquis.
LE PANLOGON 1 - Printemps 2001 / Eté 2004 ( # 001 à # 444 ) - 74 minutes
France, Chine, Jordanie, Inde, Malaisie, Maroc, Afrique du Sud, Québec, Taiwan, Italie, Hongrie, Espagne.
LE PANLOGON 2 - Automne 2004 / Automne 2006 ( # 445 Ã # 592 ) - 35 minutes
Colombie, France, Angleterre, Ouest Américain, Danemark, Mexique, Espagne, Hongrie, Pays-Bas.
LE PANLOGON 3 - Automne 2006 ( # 593 Ã # 626 ) - 12 minutes
France, Yucatan (Mexique).
LE PANLOGON 4 - Hiver / Printemps 2007 ( # 627 Ã # 665 ) - 11 minutes
France, Thaïlande, Dubaï, Suisse, Lichtenstein.
LE PANLOGON 5 & 6 - Eté 2007 / Automne 2009 ( # 666 à # 804 ) - 41 minutes
France, Autriche, Venise, Floride, Japon, Malaisie, Bornéo, Cambodge, Québec.
LE PANLOGON 7 - Hiver / Printemps 2009 ( # 805 Ã # 849 ) - 13 minutes
France, Mexique.
LE PANLOGON 8 - Eté 2009 / Hiver 2010 ( # 850 à # 916 ) - 23 minutes
France, Allemagne, Pologne, Lituanie, Montréal, Andalousie.
LE PANLOGON 9 - Eté 2010 / Hiver 2011 ( # 917 à # 1000 ) - 34 minutes
France, USA, Espagne, les 10 ans du PANLOGON.
LE PANLOGON 10 - Printemps 2011 / Hiver 2012 ( # 1001 Ã # 1112 ) - 32 minutes
France, Inde, USA.
LE PANLOGON 11 - Hiver 2012 / Été 2012 ( # 1113 à # 1175 ) - 19 minutes
France, Île de La Réunion.
LE PANLOGON a obtenu le Prix SCAM de l’œuvre d’art numérique en 2005.
En 2011, lors de sa diffusion anniversaire au cinéma l'Eldorado à Dijon, le cinéaste Joseph Morder6 devenu le parrain du Panlogon.
CHAMBRE A LOUER (L'intimité du monde)
Lydie Jean-Dit-Pannel collectionne beaucoup3. Depuis la fin des années 1990, elle garde les signes "Ne pas déranger" qu'elle ou ses amis trouvent sur les portes des chambres des hôtels du monde. Des milliers de ces petits panneaux en toutes les langues et de toutes formes composent une installation murale qui est devenue monumentale au fil des ans.
Cette installation introduit la plupart de ses expositions personnelles. Lydie Jean-Dit-Pannel évoque ainsi le locataire provisoire d’une chambre d’hôtel (l’homme sur la Terre) qui, indifférent aux périls qui menacent la planète choisit de ne pas être dérangé.
LA COLLECTION
En 2004, lors d'une visite à l'insectarium de Montréal Lydie Jean-Dit-Pannel découvre les mœurs du papillon monarque qui la fascinent. Elle commence alors la plus grande de ses collections. Lors de chacun de ses voyages, elle se fait tatouer un papillon monarque femelle à échelle 1 par un tatoueur local. Chaque tatoueur adapte à son style la même planche entomologique.
Elle porte en 2019 47 tatouages de papillons monarque sur le corps :
Québec, Nîmes, Paris, Dijon, Londres, San Francisco, Las Vegas, Cheyenne, Genève, Marseille, Caen, Copenhague, Paris, Mexico, Acapulco, Madrid, Budapest, Dijon, Merida, Chiang Mai, Bangkok, Karlsruhe, les 20 ans du Wharf, Cape Canaveral, Miami, Bourges, Belfort, Tokyo, Kuching, Kuala Lumpur, Montréal, Mexico, Gdansk, Almeria, Roswell, Los Angeles, Austin, Saint-Pierre (La Réunion), Xalapa, Hiroshima, Kiev, Paris, Moscou, Liège, Naples, Vladivostok et Chicago. Le projet est toujours en cours.
En 2014, lors d'une rétrospective de son travail dans différents lieux de Montréal, elle fait numéroter ses papillons tatoués, comme une espèce en voie de disparition, par le tatoueur Yann Black lors d'une lecture performance.
Son corps ainsi tatoué devient sujet de photographies, de vidéos et de performances.
À partir de 2012, le personnage mythologique de Psyché devient son alter-ego artistique. C'est ce personnage qu'elle met en scène dans ses œuvres.
14 SECONDES
En 2013, Lydie Jean-Dit-Pannel fait successivement 2 séjours qui vont marquer sa vie et son travail : Tchernobyl et la Région de Fukushima. Elle réalise un film intitulé "& A Fade to Grey" dans lequel son personnage de Psyché, guidé par un vent radioactif, erre à la quête d'Amour sur différents sites nucléaires de la planète.
En 2015, elle part seule pour 1 an sur les routes de France, d'un site atomique à un autre. De ce road-trip en solitaire vont naître un film, "Ad Infinitum" et une série de photographies "14 secondes (France)".
Dans "Ad Infinitum", son personnage de Psyché erre autour de 37 sites nucléaires français, toujours à la recherche d'Amour.
Dans la série de photographies "14 secondes", elle abandonne son personnage de Psyché, nue, face contre terre, comme morte, devant les sites atomiques français.
Elle poursuit ensuite cette série sur les sites nucléaires de Belgique, de Suisse, d’Angleterre et d’Écosse. Le projet est toujours en cours.
ENTERTAINMENT
En 2016, en parallèle à la série « 14 secondes », elle commence une nouvelle série photographique intitulée «Entertainment».
Dans ces photographies, elle met en scène son personnage de Psyché, toujours dans la même posture, allongée au sol comme morte, abandonnée dans des sites toxiques. La toxicité peut être physique ou idéologique, avérée ou latente. Des sites abîmés par l’Homme.
(Le colosse de Rügen à Prora en Allemagne, Seveso en Italie, Le fleuve Rio Tinto et sa mine de cuivre en Andalousie, le port de guerre de Vladivostok en Russie, la plage de verre de Ussuri Bay en Russie, le mine de charbon de Hambach et ses usines en Allemagne, la décharge sauvage de La Plaine dans les Yvelines, la plage blanche de Rossignano en Toscane.