Germain Paget (1817 - 1884] est né et a grandi à Morbier, au sein dune famille d'horlogers. Après avoir suivi une premiere formation artistique à Dole, il intègre en 1841 l'école des Beaux-Arts de Paris. II fait carrière dans la capitale, proposant régulierement ses œuvres au Salon. Artiste académique, il réalise des tableaux religieux, des scènes de genre et des portraits. Vers 1880 il quitte Paris pour revenir à Morbier et prêter main forte à l'atelier familial, specialisé dans l'estampage d'éléments pour horloges comtoises. De retour au pays natal, il poursuit son œuvre jusqu'à sa mort.
• Germain Paget est né à Morbier le 18 mai 1817, second d'une famille de sept enfants. Son père, Pierre Claude, dirigeait au moulin Paget une scierie et au village un atelier de fabrication de pièces d'horlogerie où il mit au point l'estampage pour les couronnements et balanciers.
Germain entra pensionnaire au collège royal de Dole. Il suivit aussi les cours de l'école municipale de dessin, dirigée par Jean Séraphin Désiré Besson (né à Saint-Laurent-en Grandvaux en 1795, mort à Dole en 1864).
Besson, formé à Paris par Dejoux et Pardier, fut un excellent maître, enseignant le dessin industriel et artistique, le modelage, la peinture décorative et de paysage. L'église de Morbier conserve de lui un Saint Michel terrassant le dragon, une Sainte Famille, une Assomption de la Vierge, un Christ en croix sculpté, ainsi que la décoration de la voûte du chœur.
Germain Paget, recommandé par Besson, partit à Paris en 1839 poursuivre sa formation à l'école des Beaux-Arts et à l'atelier du peintre Adolphe Brune (originaire de Souvans, près de Dole) qui recevait tous les élèves envoyés par Besson.
La formation artistique telle qu'elle était imposée par David, reposait essentiellement dans la maîtrise du dessin : dessin d'anatomie, dessin d'après l'antique, étude de perspective.
Germain Paget est alors élève à Paris. Il fréquente les ateliers de deux Francs-Comtois, Adolphe Brune et Jean Gigoux (première médaille de peinture d'histoire au Salon de 1835 avec La Mort de Léonard de Vinci, musée de Besançon), puis Thomas Couture (prix de Rome en 1837 avec Les Romains de la décadence, musée d'Orsay).
Il habite 41, rue Monsieur-le-Prince, réalise des portraits pour les membres de sa famille, mais aussi pour ses relations jurassiennes, afin de faire face aux nombreux frais que sa formation exige. L'élève doit rémunérer le « patron » de l'atelier, qui passe deux fois par semaine corriger les travaux, il achète ses fournitures et rémunère aussi les modèles qui viennent poser.
Honoré Chapuis, né à Arlay la même année que lui, fut pour Germain, un ami fidèle qui suivit le même parcours artistique pour devenir professeur de dessin à l'école des beaux-arts de Besançon en 1851.
Germain Paget prépare le concours d'entrée à l'Ecole des Beaux-Arts de Paris vers 1838. Les épreuves du concours comportaient l'exécution d'un dessin d'anatomie et d'une épure de perspective. Si ces deux épreuves éliminatoires étaient réussies, le candidat réalisait ensuite un dessin d'après nature ou d'après l'antique.
La formation reposait sur une bonne maîtrise du dessin et de la composition, la couleur étant un élément secondaire parmi les critères retenus par l'Académie.
• Le Salon, qui se tenait chaque année au Louvre (puis aux Tuileries, enfin au Grand Palais), était la grande affaire des artistes, dont les tableaux admis par le jury étaient abondamment commentés dans la presse parisienne et régionale.
Encouragé par son maître, Auguste Brune, Germain Paget y participa régulièrement à partir de 1841 avec des oeuvres religieuses, tel un Saint Paul (oeuvre non localisée).
En présentant en 1844 Saint François Xavier baptisant et guérissant les malades indiens, oeuvre commandée par l'abbé Grenier de Morez pour l'église Notre-Dame, il fut remarqué par le ministère qui lui commanda les années suivantes plusieurs copies de grands maîtres, comme La Cène de Philippe de Champaigne (déposée à l'église de Morez).
L'impératrice Eugénie, qui épouse Napoléon III en 1853, remit au goût du jour le siècle de Marie-Antoinette, encourageant les artistes qui faisaient revivre l'art de Fragonard, Watteau et Bouchet.
Germain Paget composa dans ce style de nombreuses scènes de genre. Dans un décor bucolique plein de fraicheur, il s'est plu à représenter les enfants maraudant dans la campagne, ou des personnages féminins évoluant sous les ombrages. Ces compositions sont bien connues des collectionneurs.
Germain Paget revient régulièrement se ressourcer à Morbier où il compose volontiers des portraits de notabilités locales comme le Docteur Regad, maire de Morez, (coll. part.), ou des membres de sa famille.
La Guérison de l'hémoroïsse : présentée au Salon de Paris en 1859 avec le sous-titre "Que je touche ses vêtements et je serai guérie", cette composition religieuse illustre un passage de l'Évangile de saint Marc où le Christ, cherchant à reconnaître la personne qui l'a touché par son manteau, bénit la femme se prosternant à ses pieds et la guérit. La Cananéenne, au centre du tableau, sépare deux groupes de sujets : Le Christ, à droite, dans un beau drapé, et à gauche, les apôtres, dont on distingue Jean derrière Jésus, et Luc, représenté de dos, s'adressant à saint Pierre. La gestuelle précise des personnages contraste avec l'immobilité de la belle campagne antiquisante qui lui sert de décor. Germain Paget présenta à nouveau ce tableau en 1860 à l'Exposition universelle de Besançon et en 1876 à Lons-le-Saunier. La raison de la présence de cette toile dans la collection Jourdain n'est pas connue.
• En 1860, l'Exposition universelle de Besançon ouvre une ère de dynamisme régional pour les artistes comtois. De plus, le père de Germain approche les soixante-dix ans. Aussi, celui-ci prépare-t-il son retour en faisant agrandir son atelier d'artiste à Morbier, où il continuera à peindre. Il expose ses toiles à Besançon, Lons-le-Saunier, Dijon et Lyon et reçoit ses amis artistes de Paris et d'ailleurs dans son petit cénacle. Il n'exposera plus à Paris après 1865.
L'Adoration des bergers, composée en 1868 et offerte à l'église de Morbier, est la dernière composition religieuse de Germain qui se consacre plus volontiers à des scènes de genre, portraits et paysages qu'il expose jusqu'à sa mort, en 1884.
Parallèlement à son activité artistique, Germain se consacre désormais, avec son frère Désiré, à la fabrication des balanciers estampés et dépose en 1869 et 1870 deux brevets pour éléments mobiles décoratifs sur balancier. Il imagine les motifs les plus variés : soleil, fleurs, corne d'abondance, scènes champêtres peintes ou dorées.
Germain meurt célibataire à Morbier le 8 décembre 1884 et lègue son atelier d'artiste à son neveu Léon, qu'il a formé au dessin et à l'estampage.
Extrait de Germain et Luc Paget, peintre et graveur 1817-1921
par Marie-Paule Renaud, 2008
Je tiens à remercier Marion Ledru, responsable scientifique et culturelle du musée de la lunette de Morez pour la documentation qu'elle a aimablement apportée à cette entrée ainsi qu'à Francois Buffard de l'Association Horlogerie Comtoise pour ses conseils avisés.